BIOGRAPHIE (source: Archives Nationales du Monde du Travail) et Vidéo INTERVIEW en bas de page
L’architecte Roland Simounet est né en 1927, à Guyotville où il a vécu, étudié, construit avant d’exercer en France.
C’est de son pays natal, de son climat, de sa beauté et de sa pauvreté qu’il a extrait l’essentiel de son art. Il commence des études d’architecture à Alger; il les poursuivra à Paris, à l’école des Beaux-Arts, sans jamais les terminer. Revenu à Alger, il y entame, très jeune, une carrière d’architecte. Il commence à construire dès 1951. La même année, il est membre du groupe CIAM-Alger animé par Pierre-André Émery, Jean de Maisonseul, LouisMiquel et Jean-Pierre Faure et mène une enquête dans le bidonville de Mahieddine à Alger.Celle-ci sera présentée àl’occasion du IXe Congrès international d’architecture moderne (CIAM) qui doit se tenir à Aix-en-Provence en 1953, dont le thème est «la charte de l’Habitat».
En 1954, il est conseiller technique pour l’habitat à l’Agence du plan de la Ville d’Alger. Parallèlement, il poursuit ses recherches sur la résorption des bidonvilles et l’utilisation des terrains à forte pente. La connaissance de cette organisation spatiale, élémentaire mais efficace, va le préparer, après la construction de quelques maisons individuelles, à une importante activité dans le domaine des logements de transit et des cités d’urgence : à Alger, dans le quartier de Maison Carrée, 300 logements pour une cité de «première urgence» en 1955, les 2500 logements de la cité La Montagne en 1955-1956, et 200 logements à Orléansville (Algérie), après le tremblement de terre ; à Alger encore, 800 logements collectifs en 1957-1959, pour la résorption des bidonvilles aux Carrières Jaubert ; 200 logements, en 1956-1958, à Djenan el-Hasan (Algérie), son opération la plus aboutie dans ce domaine. S’inspirant de la construction
traditionnelle, le projet combine l’architecture vernaculaire à un vocabulaire moderne de tendance corbuséenne tout en étant une démonstration exceptionnelle de l’adaptation d’un programme à un site. Adaptation à la pente, attention portéeau climat, simplicité, répétition et variété des espaces vont devenir les constantes du travail de Simounet.À côté de ces œuvres nécessaires et justes, il construit toujours avec autant d’austérité des édifices plus élaborés. Ainsi, après le séisme d’Orléansville, il y étudie, avec Louis Miquel, un centre culturel (1955-1959) qui deviendra le Centre Albert Camus (El Cheliff), bel ensemble dédié à la culture et au sport. Autre réalisation, l’église Sainte-Marguerite-Marie en 1956-1957 à Tefeschoun (Algérie). En 1958, il est désigné pour créer la nouvelle agglomération (1958-1962) de Timgad (Algérie), aux abords des célèbres vestiges de la ville romaine.
En pleine guerre d’Algérie, il est l’un des initiateurs de l’Appel pour une trêve civile en Algérie lancé par Albert Camus en février 1956. Sa venue en France coïncide avec une étude menée en 1961-1962 pour 700 logements à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) destinés aux Asociaux du père Joseph. En 1961, il rencontre le Corbusier puis Jean Prouvé. En 1962, il est en mission au Venezuela pour le plan directeur de Valencia et propose des solutions pour la résorption des barrios (bidonvilles). La même année, en Haute-Volta (aujourd’hui, le Burkina Faso), il réalise, en terre stabilisée, deux monastères puis il se rend à Tananarive (Madagascar) pour reconnaître le site de la future université. En 1963, il crée un bureau à Paris d’où il réalise la résidence universitaire de Madagascar à Tananarive en 1962-1970 ; 200 classes primaires et deux lycées au Sahara en 1963-1968 ; la résidence de l’ambassade de France à Alger en 1964 ; de nombreux logements dans la région parisienne et en Alsace. En 1968, il étudie la bibliothèque des Halles sur le site du futur Centre Pompidou (Paris). De 1969-1971, il réalise un ensemble de maisons en Corse qui, par leur simplicité et leur rigueur, le font comme redécouvrir en France et saluer dans le monde entier. De 1970 à 1973, il convertit le palais abbatial de Saint-Germain-des-Prés (Paris) en locaux universitaires. Logements à Cergy (Val-d’Oise) et Evry (Essonne), École d’architecture de Grenoble (Isère), grande demeure près de Toulon (Var), rénovation de l’îlot 1 de Saint-Denis Basilique, étude du musée d’Art islamique du Caire (Égypte), logements dans la région parisienne, alternent avec la réalisation du musée de la Préhistoire d’Ile-de-France, à Nemours (Seine et-Marne), en 1976-1980 ; du musée d’Art moderne du Nord à Villeneuve d’Ascq (Nord) en 1979-1983, et du musée Picasso à Paris en 1976-1985.
Ces programmes culturels lui permettent d’atteindre une reconnaissance internationale. En 1984, il entreprend l’étude pour la restructuration du carrefour Pleyel à Saint-Denis 1, qui se prolongera jusqu’en 1995. Les études qu’il mène pour une agglomération dans le Vaucluse (Golf Saint-Jean), le musée Rodin à Paris, le centre culturel de Belém à Lisbonne (Portugal), un hôtel à Auvers-sur-Oise (Val-d’Oise), l’École d’art d’Avignon (Vaucluse), l’École des beaux-arts de la ville de Paris, alternent alors avec la réalisation d’un ensemble de logements en bordure du Parc Citroën à Paris, de logements sociaux dans le quartier des Moulins-Gémeaux à Saint-Denis, et de l’École nationale supérieure de danse de Marseille (Bouches-du-Rhône). Il mène d’importantes études architecturales pour l’aménagement des abords du Mont-Saint-Michel (Manche), participe au concours pour le palais des congrès d’Agadir (Maroc); entreprend une étude pour le fort Saint-Jean à Marseille, réalise des immeubles de logements à Rennes (Ille-et-Vilaine), des logements sociaux au carrefour Pleyel à Saint-Denis. Sa dernière réalisation, l’immeuble de logements pour la ville de Paris dans le XVe arrondissement, est achevée en 1998, deux ans après son décès.
Roland Simounet ouvre à Paris, le 20 octobre 1964, un cabinet d’architecture appelé « Cabinet Simounet », au 182 boulevard Saint-Germain. Il ne s’est jamais associé, préférant travailler en indépendant. Il a cependant eu de nombreux collaborateurs. Son agence connaîtra de nombreuses difficultés financières. De 1992 à 1995, Pascale Langrand, architecte et fille de sa compagne, Yvette Langrand, l’assiste dans la direction de son agence. Les difficultés du cabinet sont aggravées par le fait que Roland Simounet connaît depuis la fin de l’année 1994 des problèmes de santé. En 1995, le Cabinet Simounet est racheté par la société « Attique SARL » le 26 juin de la même année, société dont est membre et associée Pascale Langrand. Roland Simounet cesse toute activité professionnelle au début de l’hiver 1995. En 1996, Pascale Langrand s’occupe de la conservation de ses archives et contribue à la publication de sa seconde monographie au Moniteur. De 1995 à 1999, pour Attique, avec Pascale Kaparis et Dominique Pinon, elle termine tous les projets de Roland Simounet en cours, divers chantiers et projets de logements (Saint-Denis, Rennes, Paris), et intervient au musée Picasso et au musée Nemours.
Roland Simounet a construit de nombreux logements sociaux mais aussi des bâtiments culturels. D’une grande homogénéité, son architecture est à l’évidence issue des terres chaudes et sèches de la Méditerranée. Depuis le début du XXe siècle, la Méditerranée (le ciel, la lumière, le soleil, l’habitat des Cyclades, le Parthénon, la voûte catalane, Alger et sa Casbah) a beaucoup intéressé les architectes, en particulier Le Corbusier, dont le souhait tenace de construire en Algérie ne se réalisa pourtant pas.
Roland Simounet a participé à de nombreuses expositions à travers le monde – dès 1957, à la XIe Triennale de Milan – et a donné des conférences à Paris, Le Caire, Rome (Italie), Lisbonne, Tunis (Tunisie), Haïti… Il a été membre de nombreux jurys, dont celui de l’Académie de France à Rome (1978-1979) et du Prix Agha Khan d’architecture (1984). Il fut membre du conseil d’administration de la Fondation Le Corbusier, de l’Académie française d’architecture, de l’Académie internationale d’architecture et grand prix national d’architecture en 1977. Il a reçu les distinctions suivantes : Grande médaille d’honneur de l’Académie d’architecture pour l’ensemble de ses travaux en 1982, Équerre d’argent 1985 pour le musée Picasso, Commandeur de l’ordre des Arts et des Lettres, Chevalier de la Légion d’honneur et Officier du Mérite national.
Il est décédé à Paris, le 10 février 1996, à l’âge de soixante-neuf ans.
Après la mort de Roland Simounet, plusieurs expositions ont fait référence à ses travaux parmi lesquelles :
- « Roland Simounet à l’œuvre : architecture 1951-1996 » , du 21 octobre 2000 – 27 janvier 2001, Musée d’Art moderne, Villeneuve d’Ascq.Cette exposition sera à l’origine de deux autres expositions :
– L’exposition « Roland Simounet et la Méditerranée », à Marseille, du 15 octobre au 31 décembre 2003, qui visait à découvrir les œuvres et documents se rapportant aux réalisations de l’architecte en Algérie et dans le bassin méditerranéen.
– L’exposition « ROLAND SIMOUNET, ARCHITECTE – L’autre visage de la Modernité » , à Toulouse, du 8 février au 29 mai 2004. Elle fut présentée par le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement de Haute- Garonne (CAEU 31) et par Actions, études et recherches autour de l’architecture (AERA) et produite par le musée d’Art moderne de Lille métropole et l’Institut français d’architecture (IFA) en collaboration avec le Centre des archives du monde du travail et l’école d’architecture de Lille. Cette exposition rétrospective propose de parcourir de façon thématique l’œuvre de Roland Simounet. - « Alger, paysage urbain et architectures », exposition réalisée par l’Institut français d’architecture (IFA) et présentée du 25 juin au 14 septembre 2003 au Palais de la Porte Dorée à Paris. Cette exposition retrace les grands cycles de transformation et de modernisation de la capitale algérienne, des dernières décennies de l’époque ottomane à nos jours. On a pu y découvrir les réalisations de nombreux architectes dont celles de Roland Simounet.
Par ailleurs, un colloque intitulé « L’architecte Roland Simounet » a été organisé aux Archives nationales du monde du travail à Roubaix le 7 décembre 2000. Un second colloque, organisé le 30 novembre 2007, avait pour thème : « D’Alger à Stockholm par la route du Nord, Roubaix célèbre les hommes de la Méditerranée. Algérie – France, regards croisés ». Cette journée d’étude fut dédiée à l’œuvre de l’architecte Roland Simounet, au cinquantenaire du Prix Nobel décerné à Albert Camus, au centenaire de la naissance de René Char et aux rééditions actuelles de la maison Gallimard (collection La Pléiade).
Des archives du fonds Simounet ont également été prêtées au centre Pompidou -Metz (Moselle) dans le cadre de l’exposition « Chefs d’œuvres » qui s’est tenue du 11 mai 2010 au 30 août 2011. Il s’agit des croquis, maquettes et notes relatifs au musée Picasso, au musée d’Art moderne de Villeneuve d’Ascq, au palais abbatial d’Avignon et de l’Université populaire d’Avignon (UPA).
Interview de 1984, architecte des travaux du Musée PICASSO dans l’Hôtel Salé, quartier du Marais à Paris (source INA)